Tout le monde en convient, l’AMO est un acquis considérable. Mais les pouvoirs publics n’ont pas été jusqu’au bout de la logique. Nous sommes loin d’un régime universel, égalitaire et cohérent.

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Nous avons accompli un grand bond en avant. Le régime de l’Assurance maladie obligatoire (AMO) est aujourd’hui un acquis, mais l’on est loin du schéma imaginé initialement. » Un constat en demi-teinte, dressé par l’une des chevilles ouvrières de l’AMO, en vigueur depuis 2005, et qui a requis l’anonymat.

Voulu au départ comme un système égalitaire, la couverture maladie pèche par sa dualité, notamment entre le privé et le public ; et au sein même du privé, entre les affiliés de la CNSS et ceux des compagnies privées, par la multiplicité des organismes gestionnaires (CNOPS, CNSS et compagnies privées), et par la complexité de sa tarification.

Sans oublier que six ans après la mise en place de l’AMO, deux franges de la population sont toujours exclues : les plus démunis (environ 8 millions d’habitants) qui attendent la généralisation du RAMED prévue, a priori, pour janvier 2012, et les professions libérales.

Pour ces dernières, les pouvoirs publics devront élaborer un régime dédié, et déterminer la base de calcul des cotisations ainsi que celle des prestations pour le faire fonctionner et le pérenniser.

Et c’est bien là que réside toute la difficulté. Car si pour les employés, le salaire reste le critère de base et l’employeur l’interlocuteur privilégié, il en est tout autrement pour les travailleurs indépendants et les professions libérales.

« Au départ, nous avions imaginé un financement obligatoire et solidaire, et nous nous retrouvons, aujourd’hui, avec des sous-systèmes qui se juxtaposent, qui ignorent la péréquation et ne bénéficient d’aucune vision cohérente globale. »

Or pour l’assurance maladie comme pour la retraite, l’une des conditions de la pérennité du régime est la base de l’assiette de cotisations : plus elle est large, plus elle est solidaire, plus les régimes seront viables. Pour l’heure, nous sommes loin de ce schéma.

D’autant, qu’au lieu d’émaner de toutes les couches de la population, la demande de soins est extrêmement segmentée. « Aussi, la couverture médicale, telle qu’elle fonctionne actuellement, est-elle confrontée à une hausse rapide des coûts pour tous les systèmes.

Parallèlement, leur capacité financière respective augmente plus lentement que leur besoin de financement. » Il est vrai que, pour l’heure, il n’y a pas péril en la demeure. Tant que les régimes ne sont pas déficitaires, chacun prêche pour sa paroisse.

A ce rythme, l’assurance maladie pourrait, plus rapidement que l’on ne le pense, être contaminée par le fléau qui sévit dans les régimes de retraite. Si les décideurs politiques, par l’entremise de l’Agence nationale de l’assurance maladie (ANAM), ne tranchent pas en faveur d’un modèle global et cohérent qui intègre toutes les couches de la population. Mais il est vrai qu’actuellement les priorités du gouvernement se trouvent ailleurs.

Mouna Kably