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FIFM,  entre Ă©vĂ©nementiel et cinĂ©ma
actuel n° 120, vendredi 9 décembre 2011
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Après l’effervescence des premiers jours, le Festival international du film de Marrakech a été d’humeur assez calme, surtout sur le tapis rouge. Côté cinéma, le beau a côtoyé le futile, mais le festival n’a pas fini de dérouler ses bobines…


Cette année, le Festival international du film de Marrakech peut se vanter d’avoir accompagné les nouveaux talents. Cela concerne tout d’abord les premiers films diffusés en compétition officielle. De belles perles, des regards cinématographiques différents se sont croisés, comme celui de l’Iranien, Amir Hossein Saghafi ou du Bosniaque Ahmed Imamovic.

D’autres projections étaient moins heureuses comme le film italien, Sevenacts of Mercy. A l’heure où nous mettons sous presse, le festival continue de dérouler ses bobines et son tapis rouge, et rien n’est encore définitif. L’heure n’est certainement pas au bilan.

Un cinéma en bonne santé

Cette année, le festival a aussi permis plus de visibilité pour le cinéma marocain. Des coups de cœur et des films hors compétition ont été projetés.

Le cinéma de Faouzi Bensaïdi, l’œil cinématographique de Leila Kilani sont, en effet, quelques indicateurs qui témoignent de la bonne santé du cinéma marocain même si l’on n’a pas pu échapper à quelques navets.

Mais ne nous voilons pas la face, nous avons besoin de plus que ça pour pouvoir parler de cinéma. Nous avons besoin de circuits de distribution, de producteurs qui portent des projets... Nous avons besoin de davantage de rencontres et de réflexions.

Le FIFM devait être une plateforme pour de nouveaux projets, pour des débats. Malheureusement l’influence du festival ne va pas au-delà de ces huit jours de projections et de festivités.

Le FIFM ne permet pas non plus la circulation des films. On a du mal à vous en conseiller quelques-uns, étant intimement convaincu que vous n’aurez pas l’occasion de les voir. N’est-il pas temps que les choses changent ?

Amira GĂ©hanne Khalfallah

Reportage photo Brahim Taougar/actuel

Leila Kilani « Il faut qu’on crée nos propres images »


On the edge de Leila Kilani a été projeté en coup de cœur lors du FIFM.

Entretien avec la réalisatrice de ce très beau film qui a pour cadre Tanger.

 

Ce premier long métrage de la réalisatrice a également été sélectionné au festival de Cannes, dans le cadre de la quinzaine des réalisateurs. Après Tanger, le rêve des brûleurs (2002), sur les candidats à l’émigration vers l’Europe ou encore D’ici et d’ailleurs, sur la mémoire industrielle en France, la documentariste passe à la fiction.

On the edge est un beau film qui annonce le début d’une carrière prometteuse. Kilani y entre par la grande porte, par sa subtilité, son écriture. Ses dialogues sont beaux, ses mots pesés.

Le jeu est juste, sans effusion inutile. Ses personnages n’ont pas d’histoire (c’est-à-dire de passé) mais existent par des actes. Le rythme est dans les phrases saccadées, dans la force physique des personnages. On entend Tanger respirer ou manquer d’air à travers la respiration de Badia et d’Imane, les deux héroïnes du film qui travaillent dans une usine à crevettes. Kilani se confie à actuel, raconte le tournage, ses choix de réalisation, l’écriture… son cinéma.

 

Pourquoi la documentariste fait-elle du cinéma ?

A l’origine de ma démarche de cinéaste, il y a la conviction qu’il y a des images à faire de l’intérieur. Il faut qu’on crée nos propres images, les plus complexes qu’elles soient avec le prisme que ça entraîne… C’est de ce côté ardent que me vient mon besoin viscéral de faire des films.

Il est évident que je reçois aussi le film de façon viscéral. L’accueil au Maroc est émotionnellement chargé. C’est ce qui est intrinsèquement ma nécessité de faire des films.

Comment a germé l’idée de ce film ?

C’était pendant le tournage de mon documentaire à Tanger. Lorsque j’ai vu une armée de femmes sortant des usines. Il y avait une telle puissance de voir cette ville endormie pendant quarante ans, en récession économique… devenir une terre d’immigration.

J’ai grandi avec une ville atrophiée qui se racontait ses propres mythes et puis cette immigration dans les années 2000. Tanger est devenue une petite Californie, la Californie des Raisins de la colère.

Je suis partie de cette matière-là. Et en parallèle, j’écrivais un film noir et finalement j’ai télescopé très vite. Un fait divers m’avait interpellée. J’avais lu dans la presse une dépêche sur la féminisation de la criminalité. L’histoire est partie de là. J’ai tout de suite vu le film qui s’ouvre sur un flash-back. Mais je ne voulais pas faire de mes personnages des criminels. Quand j’ai lu la dépêche, je me suis dit, ce n’est pas un crime, c’est un dérapage de l’âme.

 

L’univers que vous décrivez est très violent. Mais on ne retrouve pas cette violence dans les mots. Le traitement est très subtil. Tout est suggéré…

Oui, c’était ma démarche. Moi je fais confiance aux spectateurs. Le spectateur est une grande personne, il peut imaginer, il a besoin d’être stimulé et pas seulement en faisant de l’aérobic. Il peut tout à fait aimer ou pas aimer, être gêné, mais il n’a pas besoin qu’on le prenne par la main comme on aime à dire. J’ai entendu souvent la phrase « le spectateur marocain n’est pas mûr », c’est d’une telle condescendance… C’est quelque chose que je trouve extrêmement ambigu.

 

Ce qui est aussi frappant dans votre film, c’est le choix des comédiennes. Vos héroïnes ne sont pas des canons de beauté…

Pour moi, Badia est belle, même si elle n’est pas dans les canons de beauté classique. Elle a un physique de tragédienne et elle a réussi à construire un personnage – et un jeu contemporain – qui, en même temps, est réduit à une ascète.

J’ai cherché un physique qui soit dans cette âpreté. Quand on est jolie femme, on ne finit pas fille crevette. Quant à Mouna, elle est pour moi l’incarnation de la captation de la lumière. Cela dit, les deux comédiennes étaient non professionnelles. La préparation a été extrêmement longue.

Elles sont issues de la génération Star Academy. C’est l’image qu’elles avaient du jeu. Mais elles ont beaucoup travaillé. La voix, le physique, le rythme. Elles n’ont pas eu le scénario en main (même si elles me l’ont piqué à un certain moment, rires…). Je ne voulais pas qu’elles aient de certitude.

 

Ce côté hyperréaliste du jeu, de la mise en scène… cela vient-il de la documentariste ?

C’est du faux naturel, « ça ressemble à… », c’est un cinéma que j’aime. Quand vous voyez des films comme ceux de Ken Loach ou de Cassavetes, ils sont faussement improvisés et donnent cette sensation de vérité. Il faut que le spectateur ait la foi et qu’il oublie la mise en scène. Il ne faut pas qu’il se dise, « je suis en train de… »

Il n’y aucune improvisation dans le film. Mais j’ai aimé me donner cette contrainte de ne pas enlever toute invraisemblance. Moi je suis historienne de formation, j’ai besoin d’avoir un matériau que je digère, qui soit complètement inoculé dans mon cortex. Et j’aime avoir une certaine rigueur intellectuelle dont je me sers comme d’une base mais je ne filme que mes émotions.

 

Avez-vous de nouveaux projets en cours ?

Je prépare une fiction qui s’appelle Hay Riad (titre provisoire). L’histoire se déroule dans un milieu bourgeois. Je prépare aussi un polar en France et j’ai un documentaire en chantier.

C’est un web-documentaire. Il traite de la mise en scène sur Internet Ă  travers un dispositif qui est celui de la tragĂ©die grecque… de la transition et de l’invention de la  dĂ©mocratie. Ça s’appelle L’Orestie arabe.

Propos recueillis par

Amira GĂ©hanne Khalfallah

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