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Carlos Santana "Le succĂšs implique l'hĂŽnnetetĂ©"
actuel n°50, samedi 5 juin 2010
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Carlos Santana, icĂŽne de la world music, vĂ©ritable guitar-hero, s‘est produit vendredi 28 mai devant un public acquis de plusieurs milliers de personnes. L’occasion pour actuel d’aller Ă  la rencontre de ce musicien lĂ©gendaire.


***

Avant d’enflammer l’OLM Souissi, Carlos Santana nous a accordĂ© une interview aussi longue qu’un de ses solos. Il a achevĂ© son concert avec un guembri... et quand on lit son interview, on comprend pourquoi !

On assimile souvent la world music à la fusion et vice-versa. Ces appellations ont-elles un sens pour vous ? Les choses ont-elles changé ?

« Fusion is confusion » ! Mettre des Ă©tiquettes sur des courants musicaux est totalement hors sujet, hors de propos. Pour moi, les Ă©ti­quettes n’existent pas. Elles ne concernent pas les artistes. Bien que l’ĂȘtre humain y ait sou­vent recours, elles n’ont de sens que pour les responsables marketing qui aiment tout seg­menter, certainement pas pour les musiciens.

DĂšs vos dĂ©buts, vous avez mariĂ© diffĂ©rents styles de musique. Et, dans les annĂ©es 90, vous avez privilĂ©giĂ© les collaborations avec des artistes plus jeunes. Qu’est-ce qui a motivĂ© cette Ă©volution dans votre dĂ©marche ?

La dĂ©marche Ă©tait simple : se remettre en question, se rĂ©gĂ©nĂ©rer, se renou­veler. De confronter son ouverture d’esprit Ă  de nouvelles ambiances et harmonies, d’absorber de nou­veaux beats. Et cela m’a permis de rester en contact avec la musique et les talents de l’époque.

AprÚs avoir visité tant de styles musicaux, la « Santana touch » demeure inaltérée, toujours reconnaissable, unique en somme. Pouvez-vous révéler votre secret ?

VoilĂ  une belle question ! Il s’agit en fait d’ĂȘtre transparent Ă  l’énergie qui m’habite, de la laisser me tra­verser tel un cristal aussi pur que possible. Cela implique de taire, d’écarter l’égo. Cela permet de se regarder en face, de s’accepter tel que l’on est, afin de projeter une Ă©motion la plus claire possible. Et c’est lorsque l’on y parvient que le public peut Ă©galement s’y retrou­ver comme dans un miroir, et sen­tir la magie de l’instant.

En tant que natif du Mexique, pensez-vous que votre parcours puisse inspirer les artistes world/fusion du monde entier, et leur insuffler un espoir de reconnaissance globale, tels un Bob Marley ou une Myriam Makeba ?

Pour moi, le succĂšs Ă  long terme implique l’honnĂȘtetĂ©. Dans le cas d’un solo, ce qui importe c’est : d’oĂč venons-nous ? OĂč allons-nous ? OĂč voulons-nous emmener notre pu­blic ? Quel message voulons-nous partager avec lui ? Le constat que tout artiste peut changer, faire Ă©vo­luer les choses dĂšs qu’il transmet de l’authenticitĂ©, qu’il se donne pleinement, d’une maniĂšre pure et claire, et qu’il permet ainsi au public de vivre un instant « vrai », fort, intense. Il faut avoir envie de participer Ă  un miracle, garder aussi longtemps que possible la capacitĂ© d’émerveillement qu’ont les enfants.

En tant que pionnier du mélange des genres musicaux, avez-vous des conseils pour vos nombreux émules marocains, confrontés au défi de fondre différentes influences culturelles ?

Le conseil que je pourrais donner : vivre le moment prĂ©sent. Tout se passe en temps rĂ©el : je recherche la magie de l’instant. Atteindre la grĂące, momentanĂ©ment. Me sen­tir bien, en phase avec le monde.

Quels sont les artistes qui pourraient ĂȘtre vos « fils spirituels » ?

Je pense notamment à quelqu’un comme Ben Harper, ou Jamie Lang.

Avez-vous eu l’occasion d’écouter ou de voir des groupes marocains ?

Malheureusement, je ne connais pas les artistes marocains. Je ne connais que Cheb Khaled au Ma­ghreb. En revanche, j’adore le guembri : il y a quelque chose d’unique dans le mouvement que l’on peut insuffler à la musique à l’aide d’un tel instrument.

Propos recueillis par Jamil El Andaloussi

« No religion, love and peace »

AprĂšs avoir assistĂ© au concert de BB King, qu’il nomme notre « chairman of the board », Santana a allumĂ© le feu Ă  l’OLM Souissi. EngagĂ© envers l’Afrique et inspirĂ© par ses rythmes, le Mexicain s’est complĂštement lĂąchĂ© devant une foule en dĂ©lire. Il a refusĂ© de se rendre en IsraĂ«l mais, en concert au Maroc, il a hurlĂ© son dĂ©sir d’amour et de paix pour l’humanitĂ©. DĂ©jĂ  dans les annĂ©es quatre-vingt-dix, il avait formĂ© un duo avec le maĂąlem Bakbo, lors de son premier concert au Maroc. Ce vendredi 28 mai, vĂȘtu d’un large T-shirt Ă  l’effigie de Bob Marley, il a rĂ©Ă©ditĂ© cette symbiose culturelle et artistique. Sa guitare Ă©tait bien prĂ©sente, comme un prolongement de sa personne : accords salsa et jazz-rock modernes, mĂ©lodiques et accessibles, et surtout Black Magic Woman ! Les nostalgiques de Woodstock et les autres ont Ă©tĂ© exaucĂ©s.

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